La Pharmaco-épidémiologie : une discipline en plein essor complémentaire des essais cliniques

Actualités
Publié le lundi 08 novembre 2010

La pharmaco-épidémiologie est une « discipline mettant en application les méthodes et/ou raisonnements épidémiologiques pour évaluer, généralement sur de grandes populations, l’efficacité, le risque et l’usage des médicaments » (Begaud B. Dictionnaire de pharmaco-épidémiologie : 3ème édition, Bordeaux, Arme-pharmacovigilance Editions 1998).

Depuis quelques années, les études pharmaco-épidémiologiques sont en progression constante. Ces études sont en effet de plus en plus fréquemment demandées aux industriels par les pouvoirs publics (HAS, AFSSaPS, EMEA…) dans le but de suivre le devenir des médicaments après leurs mises sur le marché. Ces études ont pour objectif de répondre aux questions suivantes :

  • Le même bénéfice est il retrouvé dans la population réellement traitée par comparaison à celui identifié lors des essais cliniques ?
  • Le médicament est-il bien toléré à long terme ? (études intervenant en complément du suivi de pharmacovigilance habituel basé sur la notification spontanée des effets indésirables observés par les professionnels de santé)
  • La population rejointe (ou population réellement traitée) est-elle très différente de la population cible ? 

Les études pharmaco-épidémiologiques sont des études complémentaires des essais cliniques. L’objectif des essais cliniques est de mettre en évidence  pour une pathologie donnée l’efficacité d’un traitement, sa tolérance, son acceptabilité... Ils sont réalisés sur un petit nombre de patients sélectionnés sur des critères bien précis et sur un temps limité. Une fois le médicament mis sur le marché, il reste important de vérifier que le bénéfice attendu est retrouvé dans les conditions réelles d’utilisation et que le médicament est bien toléré à long terme. Cela fait partie des objectifs de la pharmaco-épidémiologie.

Les enjeux de cette discipline sont importants et représentent des véritables enjeux de santé publique ayant un impact à la fois surla sécurité sanitaire (les résultats pouvant engendrer des lettres de recommandations aux prescripteurs, restriction d’AMM, retrait d’AMM) mais égalementun impact économique (les résultats étant pris en compte pour la réévaluation du taux de remboursement des médicaments). 

Les études pharmaco-épidémiologiques sont des études observationnelles qui ne doivent pas modifier les pratiques courantes de prescription et d’utilisation du médicament.

Cette discipline concerne :

  • des approches descriptives : description des modalités de traitements, des caractéristiques des malades traités…
  • des approches étiologiques : étude de l’efficacité du médicament, du risque iatrogène mais également des facteurs influençant l’efficacité et la tolérance du traitement (caractéristiques des patients, co-morbidités, médicaments concomitants…).

Selon les traitements et les évènements étudiés, plusieurs schémas d’études peuvent être envisagés : études de cohortes, études cas-témoins, études transversales, méta-analyses.

De part leur approche observationnelle et populationnelle, les études pharmaco-épidémiologiques nécessitent une grande rigueur méthodologique afin de minimiser la présence de biais, pouvant engendrer des conclusions erronées.

Contrairement aux essais cliniques qui font depuis longtemps l’objet de bonnes pratiques très codifiées et d’un cadre réglementaire bien établi, les études pharmaco-épidémiologiques sont réalisées de manière beaucoup moins encadrée. Toutefois il existe des « bonnes pratiques en épidémiologie » révisées en 2007 et qui demeurent des recommandations. Actuellement, les études observationnelles nécessitent uniquement une déclaration au CCTIRS et à la CNIL, obligatoire pour toutes les études nécessitant le recueil des données concernant les patients. Un projet de loi (loi Jardé) est actuellement en discussion au parlement.

L’amélioration de la qualité globale des études pharmaco-épidémiologiques passe par une meilleure connaissance de l’intérêt de ces études, des problématiques liées à l’approche observationnelle et populationnelle et des moyens à mettre en œuvre dès la réalisation du protocole pour pouvoir répondre correctement à l’objectif fixé.

 Laure LACOIN

Chef de Projet Pharmaco-épidémiologie

CLINACT

Retour aux autres articles